Clémence incompréhensible pour deux condamnés du TPIR!

A l’heure où la Cour d’assises de Bobigny confirme en appel  une peine de 25 ans de prison pour « génocide et complicité de crimes contre l’humanité » à l’encontre de Pascal SIMBIKANGWA, quelques mois après la condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité de messieurs NGENZI et BARAHIRA par la Cour d’assises de Paris, nous apprenons que le juge Theodor MERON, président du MTPI, le Mécanisme de l’ONU pour les Tribunaux Pénaux Internationaux, vient de prendre une mesure de clémence en faveur de deux condamnés du TPIR détenus au Mali. Ferdinand NAHIMANA et Emmanuel RUKUNDO, condamnés respectivement à 30 ans et 23 ans de prison, vont donc bénéficier d’une libération anticipée! (1)

Le plus choquant réside sans l’argument avancé par le juge du MTPI:  » Même si les crimes dont NAHIMANA a été reconnu coupable sont très graves, le fait qu’il a déjà terminé les deux-tiers de sa peine depuis le 27 mars 2016 et le fait qu’il a montré des signes de réhabilitation militent en faveur de sa libération anticipée. » L’argument est le même en ce qui concerne l’abbé RUKUNDO. « Des signes de réhabilitation? »

Cette nouvelle ne peut que choquer les rescapés du génocide et tous ceux qui se battent pour que justice soit rendue. La justice française commence à peine à condamner que, d’un autre côté, on ouvre les portes des prisons sans que les peines auxquelles les accusés ont été condamnés n’aient été complètement effectuées. Le génocide, on ne le dira jamais assez, est « le crime des crimes« . On aurait pu penser que ceux qui sont condamnés ne puissent pas bénéficier d’une remise de peine! Il faudra donc s’y faire! Nous apprendrons sans doute, dans les mois à venir, que BAGOSORA et consorts obtiendront une réduction de peine pour « bon comportement« , et qu’ils demanderont peut-être à obtenir l’asile en France pour y rejoindre leur famille.

On peut légitimement s’interroger: cette décision est-elle celle d’un homme seul ou le résultat d’une politique du MTPI? Est-il normal d’appliquer à des condamnés pour génocide les mêmes droits que ceux accordés à des criminels de droit commun? Il se peut que, juridiquement, cette décision puisse être prise, mais elle n’en reste pas moins insupportable. La tentation pourrait être grande de renoncer à poursuivre, 22 ans après, tous ceux qui se sont déshonorés en participant au génocide des Tutsi. Nous n’y cèderons pas toutefois car nous avons la ferme conviction qu’une vraie justice est un des seuls chemins vers une réconciliation à laquelle nous voulons croire. « Sans haine ni vengeance », nous continuerons le combat pour que justice soit rendue aux victimes du génocide des Tutsi.

Alain GAUTHIER, président du CPCR

(1) http://www.voaafrique.com/a/rwanda-liberation-anticipee-pour-un-historien-et-un-pretre-condmanes-par-le-tpir/3636420.html

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