Procès Simbikangwa: 26 février 2014 après-midi.

« J’ai assisté à un cinéma »

Après avoir qualifié la semaine passée certains témoignages de comédie, Pascal Simbikangwa ne change pas sa ligne de défense. Il ponctue celui de Diogène Nyirishema, gardien d’une maison située à quelques encablures de son propre domicile (dans le quartier de Kiyovu) pendant le génocide, par un tonitruant et goguenard : « j’ai assisté à un cinéma ! je n’ai jamais rencontré cet homme, je ne le connais pas ».
 
Pourtant, petit à petit, cette ligne se fracture par endroits : il reconnait avoir écouté la RTLM la veille; et  ce jour-là, y être allé, avoir beaucoup circulé pendant le génocide, et concède même avoir vu trois barrières de miliciens.
 
 
Il faut dire que la journée a été épouvante pour l’ancien capitaine. 
 
Les deux temoins de l’après midi  décrivent sur plan son quartier cerné de barrières, dont une, en face de son domicile.
Si Salomon Habiyakare, lui aussi gardien dans le même pâté de maison, est aussi formel que Diogène Nyirishema, c’est que l’un et l’autre ont tenu une de celles-ci.
Plus ou moins contraints, plus ou moins innocemment, mais tous deux l’affirment : ils ont été témoins de meurtres et ont vu des cadavres, partout autour d’eux.
Ils attestent aussi avoir vu Pascal Simbikangwa fournir au moins un fusil à Jonathan Rekeraho, responsable de la barrière près de la maison de son voisin Abderamane Sadala .
 
« Je l’ai fait par devoir et parce qu’il y avait des réfugiés chez lui, pour sa sécurité, on l’avait oublié ! » s’est défendu l’ex-capitaine. 80 réfugiés, précise-t-il. 
« 80 personnes chez Abderamane Sadala ? C’est un mensonge ! » tonne Diogène Nyirishema à l’adresse de Me Philippart (CPCR).
 
Comme la veille, Me Epstein s’emploie à attaquer le témoin sur des détails, sans pour autant le déstabiliser. Avec beaucoup de malignité, il lance alors à la salle « on va passer à la question des barrières, c’est un sujet que vous maîtrisez mieux ».
 
 
 
« C’est insupportable ! « 
 
Il est  un peu plus de 15h30. Me Epstein s’approche de la barre, de plus en plus près. Il  assène question sur question en direction du témoin pour tenter de confondre les contradictions de ses précédentes déclarations. Ce dernier s’agite, s’embrouille.
L’avocat de la défense, toujours plus pressant, pose même alors la main sur la barre. Diogène Nyirishema s’essuie le visage frénétiquement avec son mouchoir, perd ses moyens. Les esprits s’échauffent, la salle s’agite et l’avocat général Bruno Sturlese explose :  » c’est insupportable ! « 
 
Incident de séance. 
Le président Olivier Leurent intervient pour calmer les esprits. Me Epstein lui tourne le dos, tout sourire, face à la salle.
Il revient sur le fond et questionne le témoin sur la nature du fusil donné par Pascal Simbikangwa. Enfin, pour conclure, il cherche à savoir si le témoin ne dissimule pas d’autres intentions, s’il se considère « comme une victime ». Diogène Nyirishema lui répond d’une phrase « Je ne suis coupable de rien et ne vois pas en quoi je serais une victime ».
 
Diogène Nyirishema a aussi certifié que Pascal Simbikangwa ravitaillait très fréquemment les barrières en vivres et en armes.
Salomon Habiyakare, lui, n’a vu Pascal Simbikangwa sur une barrière que lors de la livraison du fusil à Jonathan Rekeraho. Mais il confesse avoir surtout gardé la sienne de nuit, en lieu et place de son collègue. 
 
Il est 21 heures ce mercredi soir, et Me Bourgeot avoue à la cour sa fatigue, comme celle de son client « qui s’endort ». Le président Olivier Leurent reconnait qu’il est tard, que l’ambulance de Pascal Simbikangwa l’attend et suspend l’audience.
 
Elle reprendra demain avec l’audition de… Jonathan Rekeraho.
 
Guillaume Brunero.

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