En date du 16 mai 2025, les juges d’instruction parisiennes en charge du dossier d’Agathe KANZIGA HABYARIMANA publiaient une « ordonnance de rejet d’acte complémentaire et de NON-LIEU » en faveur de l’épouse de l’ancien président du Rwanda. Aussitôt, le Parquet National Anti-terroriste et le CPCR faisaient appel de cette décision. Un délai de trois mois était requis pour faire connaître les raisons pour lesquelles nous faisions appel.
Sans attendre l’étude des mémoires envoyés par les parties, les juges d’instruction publiaient, le 21 août 2025, la même ordonnance que celle du 16 mai, demandant à nouveau un non-lieu en faveur de madame KANZIGA. Ce qui ne manque pas de provoquer la stupeur du CPCR.
En effet, on peut se demander pourquoi les juges se sont empressées de publier à nouveau leur ordonnance sans attendre l’étude au fond la clôture de la procédure précédente. Pour le CPCR, il y a là une volonté d’en finir avec une affaire qui traîne depuis le 13 février 2007, date à laquelle notre association déposait plainte contre l’ex- première dame du Rwanda complaisamment accueillie en France dès les premiers jours du génocide perpétré contre les Tutsi. Depuis, madame KANZIGA vit sur le territoire français sans reconnaissance du statut de réfugiée ni sans titre de séjour. Une situation difficile à comprendre à une époque où on fait la chasse aux sans papiers : « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. » (La Fontaine, Les animaux malades de la peste« ).
D’autant que l’ordonnance des juges était critiquable à plus d’un titre. Un seul exemple : pour dédouaner madame KANZIGA de toute responsabilité dans la préparation du génocide, elles ont fait appel au témoignage de monsieur Gaspard MUSABYIMANA. Ce dernier avait pris la défense de Protais ZIGIRANYIRAZO, le frère de madame, devant le TPIR. En ignorant, ou en faisant semblant d’ignorer que le nom de ce monsieur se retrouvait sur l’organigramme de la RTLM en tant que membre de la « Commission de la technique et des programmes ». Un témoin digne de foi!
On baigne dans la plus grande des incohérences. De quoi nous faire douter de la justice française et de quoi nous interroger à nouveau sur la jurisprudence de la Cour de cassation qui a toujours refusé de répondre favorablement aux mandats d’arrêt internationaux adressés par le Rwanda. Ce refus d’extrader au Rwanda les personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide des Tutsi est de plus en plus contestable.
Le CPCR ne manquera sans doute pas de faire appel de cette ordonnance de non-lieu. Affaire à suivre.
Alain GAUTHIER, président du CPCR