Procès en appel de SIMBIKANGWA. Samedi 3 décembre 2016. J27 Parole à l’accusé.

En ce dernier jour d’audience, parole est donnée à l’accusé.

Aux membres du jury: « Vous êtes des hommes de droit, comme les avocats. Mes conseils ont tout donné, tout expliqué. L’accusation n’avait pas de fondements. Je viens de faire neuf ans de prisons dans des conditions difficiles, envoyé en prison dans des circonstances qu’on vous a exposées! » Monsieur SIMBIKANGWA veut toutefois ajouter quelques mots. D’abord à l’adresse des avocats généraux concernant le port d’arme pour justifier le fait qu’il avait un pistolet: « Capitaine je suis, capitaine je mourrai. » Puis à celle de Maître PHILIPPART, avocate du CPCR qui, tout le monde le sait, « n’aime pas les cotes! » Et pourtant les cotes le défendent. D’ajouter, toujours admirateur de la France et de sa justice: « La France n’accepte plus de procès en sorcellerie. » Un petit coup de griffe ensuite à l’encontre de maître Safya AKORRI, avocate de Survie, qui lui aurait fait remarquer qu’il avait manqué de respect au président et aux avocats généraux: « Cette façon de racolage (sic) n’est pas digne d’un avocat. Je me suis défendu. J’ai un grand respect pour le président et les avocats généraux. Elle a voulu me dresser contre l’autorité. »

Il ne pouvait pas terminer ses compliments sans parler de maître FOREMAN, avocat du CPCR. « J’ai un contentieux avec lui. Il s’est constitué opposant de sa propre idée (sic). Il a refusé qu’on étudie le cas des témoins un à un. Il a refusé le débat. la justice veut la clarté. »

De revenir ensuite sur le cas de son frère Bonaventure MUTANGANA, qui était venu pour prendre sa défense. Or, « il a été convoqué dans un tribunal parce qu’il y a des lobbies qui ont fait ça!« . Après avoir relevé des anomalies dans des documents du TPIR, dénoncé la corruption au Rwanda, il revient sur la seule remise d’arme à laquelle il ait participé, et encore comme intermédiaire non comme donateur, celle de REKERAHO. Et de préciser, pour bien montrer qu’il connaît la différence entre les deux termes, il rappelle qu’il a appris le Français de Jean de La Fontaine.

Contrairement à tous ceux qui disent qu’il est « méchant » (c’est sa réputation), il va passer en revue toutes les personnes qu’il a aidées. Pour finir par s’excuser d’avoir pris du temps pour le dire. Et de rappeler que ses conseils ont tout dit. On s’attendrait à entendre sa conclusion, mais l’accusé ne s’en tient pas là.

Il passe en revue toutes les barrières auxquelles on l’accuse de s’être présenté, ce qui va lui prendre pas moins d’une heure. Il démonte un à un tous les témoignages et termine invariablement chaque cas par: « Quel crédit accorder à un tel témoignage. « Il est inadmissible pour lui, qu’en France, on puisse entendre des témoignages pareils… Si on doit écouter des balivernes pareilles. » Et de terminer cette partie de son intervention: « Il n’y a pas eu d’armes distribuées, pas eu d’instructions données à des civils. Si vous écrivez ça, ce ne sera pas la justice! »

Va suivre alors la lecture d’un très long texte, qu’il appelle « mot aux victimes« ! Quelques phrases captées au fil d’une lecture dans un style qu’on lui connaît bien, ampoulé, toujours à la limite de la compréhension.

Parlant de ce procès: « Chacun comprend ce que cela coûte à la fragilité de ma santé… Ma vie vaut moins que mon innocence… L’accusation a refusé les évidences qui disqualifient leur thèse… Pas un seul grief fondé… Je suis l’une des principales victimes. » Et d’énumérer les victimes de sa famille. Aucun mot pour toutes les autres! De poursuivre: « J’aurais dû avoir la palme du bon citoyen. » S’adressant à la Cour: « J’ai lu dans vos yeux la probité que j’attendais d’une Cour de France… Chacune de vos voix compte. » « Les coupables méritent le châtiment de la justice... » Et de convoquer ROUSSEAU, BALZAC, VOLTAIRE, un RABELAIS shakespearien, CESAIRE! Il prend à témoin l’Homme Dieu… Il fait du SIMBIKANGWA. Maître EPSTEIN semble vouloir le faire résumer, rien n’y fait.

Puis de se lancer dans un Hymne à sa mère. Et d’oser:  » J’associe cette offrande à l’épouse de madame GAUTHIER! » Dans cet hommage à sa mère, encore plus confus que tout ce qu’il a dit auparavant, il évoque le Rwanda de ses souvenirs, compare la Tour Eiffel au Karisimbi, nomme le Sacré-cœur. Son discours ressemble à un sermon, tout en reconnaissant que, s’il aime le Christ, il reste animiste. Et de conclure enfin, s’adressant une nouvelle fois à la Cour: »Il vous revient doublement de rendre justice à celui qui le mérite. »

Dernière intervention du président DE JORNA.

Monsieur le président DE JORNA prend la parole à son tour pour indiquer aux jurés quel va être leur rôle. Les questions posées seront les mêmes que celles qui l’ont été en première instance, sauf en ce qui concerne les faits de Gisenyi, prescrits. Deux questions subsidiaires leur seront posées:

1) l’accusé est-il coupable de génocide?

2) l’accusé est-il coupable de crimes contre l’humanité?

Les parties dispensent le président de lire les douze questions qui seront posées. Les questions étant « tenues pour lues« , une dernière adresse aux jurés, la dernière question qui leur sera posée: « Avez-vous une intime conviction? »

La Cour se retire pour délibérer.

Alain GAUTHIER, président du CPCR

 

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