Procès en appel de SIMBIKANGWA. Vendredi 4 novembre 2016. J7

Le témoin René DEGNI-SEGUI, qui devait être entendu ce jour, réside en Côte d’Ivoire et pour des raisons de logistiques, il n’a pu faire le déplacement à Bobigny: ces exigences pour le transport n’avaient pu être satisfaites. Une visioconférence avait été envisagée mais son pays n’était pas en mesure de l’organiser. Le tribunal décide de passer outre sans toutefois renoncer à l’entendre [1]. Il est donc décidé, en attendant, de procéder à une lecture du rapport qu’il a remis en 1994.

La Cour décide de passer outre concernant les auditions de messieurs Thierry CRUVELLIER (injoignable) et Faustin TWAGIRAMUNGU (malade) prévues lundi 7 novembre. La défense demande à faire entendre monsieur Pierre PÉAN!

Monsieur René DEGNI-SEGUI, envoyé spécial des Nations Unies au Rwanda.

Monsieur René DEGNI-SEGUI était membre de la Mission d’enquête de la FIDH en 1993 aux côté de jean CARBONARE et autres militants des droits de l’Homme. En juin 1994, il se rendra au Rwanda en tant qu’envoyé spécial des Nations Unies. Monsieur le président propose de faire la lecture du rapport qu’il a rédigé.

Rapport du 28 juin 1994 [2]. Lors de son séjour au Rwanda, monsieur DEGNI-SEGUI a rencontré toutes les parties en présence et visité des lieux symboliques, tel que le Stade Amahoro.. L’attaque de l’avion est présenté comme « la cause immédiate des événements dramatiques » qui continuent à se dérouler. Le rapporteur note une certaine frustration des personnes rencontrées, en proie à la terreur des milices. Monsieur DEGNI-SEGUI parle de massacres « d’une ampleur inégalée » perpétrés par les Interahamwe. Dans la zone occupée par le FPR, il note qu’il y a eu peu de morts. Les massacres ont visé les Tutsi et les Hutu modérés, « contre des personnes nues et sans défense« . Le génocide s’est répandu dans tout le pays suite aux exhortations des autorités politiques. S’est organisée aussi une « chasse à l’homme de maison en maison« .

A ce stade de la lecture, monsieur Régis DE JORNA interroge l’accusé.  » Monsieur SIMBIKANGWA, vous étiez sur place. Vous venez d’entendre la lecture du rapport. Comment expliquez-vous que vous n’avez rien vu? »

Monsieur SIMBIKANGWA. « Mon problème n’est pas de ne pas reconnaître des morts. Je suis sorti un peu tard, la première fois le 9 avril. La mairie avait déjà déplacé les corps. J’ai la chance de ne pas avoir vu les morts. Béatrice m’a fait souvenir d’un corps qui brûlait à Nyamirambo. A cause du couvre-feu le 7, je ne suis pas sorti. Les FAR et le FPR étaient là et j’ai toujours pensé que ces deux forces se battaient. Les deux gardes qui m’accompagnaient sont sortis le 8 pour accompagner mon « frère » (Bonaventure MUTANGANA) qui était allé chercher monsieur HIGIRO. On sait bien que les Tutsi étaient menacés de puis 1960! »

A la question du président qui insiste sur sa sortie du 9, l’accusé parle de « malveillance à son égard. » « Je ne suis ni PLATON ni SOCRATE. Je suis intègre. Si je n’ai rien vu! Pas vu de corps sur la route! » Il parle de la « profondeur de la catastrophe, si importante« , pour ajouter que « les Rwandais sont devenus des menteurs. Ce qu’on raconte sort de la vérité »! (NDR. Propos pas toujours cohérents, raisonnement difficile à suivre).

Monsieur DE JORNA demande à l’accusé si les images qu’on a vues (projection de la veille « Tuez-les tous« ) sont truquées. « S’agit-il d’un montage? »

Comme à son habitude, l’accusé ne répond pas à la question: « Il y a eu des morts, même dans mon entourage, dans ma famille. On ne veut pas reconnaître la vérité ». Évoquant son cas personnel: « On prend l’innocent, on le rend fautif! »

Le président insiste. « On insiste parce qu’on est incrédules face à votre témoignage. On lit dans le dossier que vous n’avez jamais vu de cadavres, que les images ont été faites par la télévision américaine à Byumba dans la zone tenue par le FPR« . SIMBIKANGWA de répondre: « Il y a eu des morts dans la zone tenue par le FPR. Je suis un homme juste. J’ai fait 8 ans de prison à partir d’un dossier faux. Rien ne peut démontrer que je ne dis pas vrai. Jamais je n’aurais fait 8 ans de prison si on avait suivi les juges! »

Le président lui rappelle que c’est bien la justice française qui l’a déféré devant la Cour d’assises, ce ne sont pas des témoins. « C’est un magistrat français qui a pris les décisions. Le titre de la détention a été rédigé par un magistrat« . L’accusé ferraille à nouveau:  » Cette fois, j’espère que la justice de France ne va pas se faire abuser! »

Revenons au rapport de DEGNI-SEGUI [2]. On parle de « massacres programmés » en côte D186. On évoque  » la haine des médias et du gouvernement« , on parle de « distributions d’armes à la population, d’entraînement des miliciens« . Le rapporteur note la « rapidité des massacres juste après l’attentat! » Des barrières ont été installées 30 à 45 minutes après la chute de l’avion. La liste des personnes à exécuter circule et on assiste à l’assassinat des leaders. On décrit « l’horreur des tueries » et vous dites que vous n’êtes pas sorti! Avant 1994, il y a eu une exhortation à la haine ethnique! « Vous, vous êtes au courant de cela. Le renseignement était votre métier? »

Pour toute réponse, SIMBIKANGWA rappelle que « DEGNI-SEGUI faisait partie de la commission CARBONARE, commission qui a fait beaucoup de fautes. Ils ont refusé de me recevoir. Avant la mort de HABYARIMANA, il n’y avait rien! » Quand le président lui demande s’il n’a jamais entendu de messages de haine, l’accusé évoque « Radio Muhabura », la radio du FPR, le « pendant » de la RTLM qu’il n’écoutait que rarement: « C’était ma radio mais elle ne me fournissait pas ce que je voulais » (NDR: il en était actionnaire.)

Et la distribution massive des armes? « Je n’en ai pas été témoin mais je l’ai appris. les armes distribuées aux Interahamwe ont été récupérées« . Et les barricades? « Il y avait des barrières depuis 1990. Les civils ne les ont occupées qu’après pour lutter contre les pillard et les voleurs!

Lorsque le président continue la lecture du rapport en soulignant les violations des droits de l’Homme causées par le refus de l’alternance, l’incitation à la haine, l’impunité… l’apparition du Hutu Power, l’assassinat de la première ministre…, l’accusé se déclare en désaccord avec l’analyse de DEGNI-SEGUI. Pour lui, le président de la république avait fait trop de concessions à l’opposition.

Maître EPSTEIN surgit et dénonce le fait qu’il ne peut y avoir de « débat contradictoire » en l’absence du témoin.

Imperturbable, le président poursuit la lecture du rapport. Incitation ethnique et violence, tueurs assoiffés de sang et qui s’apprêtent à exterminer, publication des Dix commandements des Bahutu, la RTLM inoffensive dans ses programmes en langue française mais très agressive en Kinyarwanda! Monsieur DE JORNA s’étonne de n’avoir jamais entendu l’accusé dénoncer ces exactions. Ce dernier se défend comme il peut. Et quand un juré l’interroge sur la liste des personnes à exécuter, SIMBIKANGWA répond que son nom est aussi sur cette liste. Mais on lui fait remarquer qu’il ne sera pas exécuté! (NDR: parle-t-on bien de la même liste? A ce stade, on se perd un peu dans les explications!)

Maître Rachel LINDON, pour la LICRA, pose des questions courtes. Doit-elle l’appeler Capitaine? « Appelez-moi Général » ironise l’accusé. L’avocate évoque les non-lieux de la fin de l’instruction. L’accusé signale qu’il s’agit de celui qui concerne madame UMULINGA, ce que réfute maître PHILIPPART qui signale que c’est parce que les faits étaient prescrits que madame UMULINGA est sortie du dossier.

Maître LINDON poursuit. « La feuille liminaire déclare un non-lieu pour les faits de Kesho [3]. Mais vous n’avez pas vu un cadavre. Vous avez un problème de vue, d’odorat, d’ouïe? 65 000 morts, rien entendu, rien vu, rien senti? « Les odeurs, je les ai entendues (sic) partout! » répond l’accusé qui perd un peu pied. Ce dernier, questionné sur la RTLM et la notion de « cafard« , « d’Inyenzi« , va expliquer l’origine et l’emploi du mot [4]. « Vous avez un téléphone », poursuit l’avocate, vous n’appelez personne? » L’accusé reconnaît qu’il a appelé la Présidence et la Garde présidentielle.

Au tour de l’avocat général de questionner l’accusé: il veut savoir quelle importance s’accorde l »accusé à cette époque. « Même si je ne travaillais plus, j’étais important! » Monsieur CROSSON DU CORMIER veut savoir aussi pourquoi il figure sur cette fameuse liste des 200. Après avoir répondu à côté de la question, il déclare que c’est parce qu’il est un proche de HABYARIMANA.

Va suivre une discussion tendue concernant les différents non-lieux partiels contenus dans le dossier. Les raisons? Ou bien certains faits étaient prescrits (torture et barbarie), ou bien les charges n’étaient pas suffisantes (Kesho [3], morts de la famille UMULINGA). Maître EPSTEIN a beau vouloir dire que c’est parce qu’il y avait de faux témoins, il lui est répondu que ce n’est pas la raison officielle: pas de charges suffisantes.

Maître FOREMAN tente, malgré les protestation de la défense, d’expliquer la démarche du CPCR dans sa constitution des plaintes. Il s’en prend à la défense qui voudrait faire croire que les non-lieux sont « des brevets d’innocence« . « C’est FAUX », martèle l’avocat, « l‘accusé a bénéficié de charges insuffisantes! »

L’avocat général monsieur CROSSON DU CORMIER se lance dans une leçon pédagogique en direction des jurés qui doivent se sentir un peu perdus par la tournure que prennent les débats. « Personne n’a contesté la présence du CPCR comme partie civile. C’est vous, les jurés, qui allez juger. Des non-lieux ont été prononcés sur des faits dont le juge pense qu’ils ne sont pas suffisamment prouvés. Je suis là pour soutenir l’accusation. Le Parquet n’a pas fait appel concernant les non-lieux prononcés. Vous serez 12 à départager tout ce qui a été dit. Les faits sont graves« .

Cette intervention ramène un peu de sérénité dans les débats, ce dont se félicite la défense qui questionne alors son client. Maître EPSTEIN veut que l’accusé dise clairement quel était son statut en 1994. Il veut surtout faire entendre que SIMBIKANGWA n’était plus celui qu’il avait été. Une question sur Radio Muhabura donne l’occasion à l’accusé de préciser qu’il s’agit de la radio du FPR, une radio de propagande en vue de la prise du pouvoir. L’avocat veut savoir aussi pourquoi son client n’a pas dénoncé les massacres. L’accusé revient sur son livre La guerre d’octobre (1991) [5] pour attribuer au FPR la responsabilité de ce qui est arrivé. « Le FPR savait qu’avec la guérilla qu’elle menait cela allait entraîner la haine tribale. je me suis inquiété pour les Tutsi. Je voulais que cette guerre s’arrête« .

Le dialogue de l’avocat avec son client se termine sur le rapport de DEGNI-SEGUI.  » Guerre/génocide? C’est une question politique plutôt qu’ethnique. Le FPR a tout fait pour semer le chaos et prendre le pouvoir. »

 

Audition de monsieur Gaspard MUSABYIMANA, écrivain/éditeur, chercheur, cité par la défense.

Le témoin déclare avoir connu l’accusé alors qu’il travaillait lui-même au Service de renseignements comme Directeur des Ressources humaines.  » C’était un fonctionnaire comme les autres. Je le connais comme quelqu’un de courageux. je n’ai rien de répréhensible à dire contre lui« . Il s’étonne qu’on puisse reprocher à SIMBIKANGWA d’avoir commis le génocide. « En fauteuil roulant? C’est comme si on disait que la limace a brûlé la forêt! » La déposition spontanée du témoin s’arrête là et on comprend très vite qu’on n’en saura pas beaucoup plus, même avec la série des questions qui va suivre.

Le président veut connaître l’organisation du Service Central du Renseignement et savoir si le témoin avait des liens privilégiés avec l’accusé. Le témoin décrit l’organigramme: quatre sections (immigration/renseignement intérieur/renseignement intérieur/ressources humaines). Le témoin est directeur de ce dernier secteur. Rien de plus sur l’accusé.

Monsieur DE JORNA évoque le fait que le témoin s’est rendu au TPIR dans deux affaires: celle de Casimir BIZIMUNGU et celle de Protais ZIGIRANYIRAZO, alias monsieur Z, frère de madame HABYARIMANA. Monsieur MUSABYIMANA reconnaît qu’il s’est rendu au TPIR à la demande de maître PHILIPPOT qui voulait qu’il intervienne comme expert. Son rapport s’intitule « De l’Akazu et de son instrumentalisation politique (août 2006). Vont suivre des explications de texte sur les notions d’Akazu, de Réseau Zéro, d’Escadrons de la mort [6].

Akazu [6].

Selon le témoin, ce mot est entré en politique en 1991 avec la naissance du multipartisme, et ce pour discréditer les proches de HABYARIMANA. Etre membre de l’Akazu représentait un danger, et accuser quelqu’un d’y appartenir avait pour but de la salir. Les proches d’Agathe HABYARIMANA sont cités comme faisant partie de l’Akazu (Élie SAGATWA, ZIGIRANYIRAZO…(NDR. Sans oublier Séraphin RWABUKUMBA peu cité et qui n’a jamais été inquiété!) Le témoin se présente comme un chercheur et non comme un proche du pouvoir. Il était membre du MRND. Le témoin évoque aussi l’existence des « ennemis infiltrés« , ces membres du FPR qui détiennent le pouvoir économique. De citer Valens KAJEGUHAKWA, « combattant infiltré« !

Au président qui fait remarquer que le TPIR a utilisé le mot Akazu comme une base de ses accusations, le témoin ne manque pas de faire remarquer à son tour que « Z, accusé d’appartenir à l’Akazu a été acquitté » (NDR. Z a été acquitté en appel mais le témoin se garde bien d’en donner les raisons. Les cinq juges de la chambre d’appel ont  conclu que leurs collègues s’étaient « gravement fourvoyés dans le traitement des preuves » et qu’il n’y avait pas d’autre choix que l’acquittement.)

Le témoin va conclure sur le sujet en déclarant que l’Akazu n’a jamais existé. Il s’oppose en cela à madame Alison DESFORGES, qui « a commis beaucoup d’erreurs« . Le témoin en profite pour égratigner les chercheurs qui s’auto nourrissent sans jamais confronter leurs recherches. Et d’ajouter qu’il y a des « failles criantes » dans le rapport de la FIDH de 1993.

Le Réseau Zéro [6].

Cette notion a été inventée par Christophe MFIZI, alors conseiller du président. Ayant eu des démêlés avec monsieur Z, il a été renvoyé de l’ORINFOR (NDR: Office Rwandais d’Information). Il a alors publié un rapport qui lui a ouvert les portes du parti MDR. Il s’agit donc d’une vengeance contre Z. Pour le témoin, MFIZI a pratiqué « la politique du ventre« .

Les Escadrons de la mort [6].

Ce terme n’est pas propre au Rwanda et a été inventé, voire importé par Janvier AFRICA. Ce bagagiste de l’aéroport a fondé un journal, UMURAVA Magazine. Il avait été recruté comme indicateur par SIMBIKANGWA et a été récupéré par Édouard KARAMIRA du MDR. Ce sera ensuite le FPR qui le récupèrera à son tour. Mais le FPR ayant tué ses parents, il a fui le pays. On prétend que les membres des Escadrons de la mort se réunissaient chez SIMBIKANGWA au lieu dit La Synagogue. Le témoin conclut le sujet en disant que l’Enquête citoyenne a été à son tour abusée par Janvier AFRICA. Pour MUSABYIMANA, « tout a été diabolisé pour discrédite le régime HABYARIMANA en vue de prendre le pouvoir ».

« MUSABYIMANA, chercheur ou défenseur de ZINGIRANYIRAZO? » interroge le président qui fait allusion à un article publié par le témoin et intitulé: « L’usage abusif de la notion de constat judiciaire devant le TPIR » (mai 2010), texte diffusé lors d’une conférence qui s’est tenue à Bruxelles.

Le témoin s’explique. « Ce document ne concerne pas la notion de génocide mais porte sur le fait qu’il s’agit d’un conflit venu d’Ouganda« . Monsieur MUSABYIMANA conteste « les arrêts abusifs du TPIR, les rapports biaisés des experts, la genèse de l’agression du Rwanda par l’Ouganda, les faits et les témoignages sur l’agression du Rwanda par le pays voisin. Pour lui, en 1990, « c’est l’Ouganda qui agresse le Rwanda! »

A la question du président qui veut savoir si le témoin conteste l’existence d’un génocide au Rwanda, ce dernier lui réplique assez vertement:  » Vous mélangez beaucoup de choses! Je dis simplement que le constat judiciaire a coupé court à toute discussion. »

Colère de maître EPSTEIN:  » Ce qu’on est en train de faire, c’est du n’importe quoi. Heureusement que le témoin se défend bien« .

Un assesseur cherche à savoir comment on était recruté par le SCR. Le témoin répond qu’il était fonctionnaire et qu’on l’a nommé à ce poste. Quant à SIMBIKANGWA, il a été nommé aussi, peut-être en sa qualité d’handicapé laisse entendre le témoin.

La réputation de SIMBIKANGWA? Manifestement, le témoin ne veut rien en dire. Il sait simplement qu’il « a publié un livre quand il était infirme« .

Une autre question adressée au témoin va encore mettre l’avocat de la défense hors de lui. « Vous êtes chercheur, mais dans quel domaine? » Maître EPSTEIN s’insurge contre le fait que c’est la première fois qu’on pose cette question à un témoin de contexte. Il retiendra la leçon! Monsieur MUSABYIMANA reconnaît que sa position est contraire à celle d’autres chercheurs mais il confirme que, pour lui, c’est bien l’Ouganda qui est à l’origine de la guerre déclenchée en octobre 1990. Thèse minoritaire ou pas, c’est la sienne.

Maître Justine MAHASELA, pour la LICRA, interroge à son tour le témoin. « Madame Alison Des FORGES avait le statut d’expert au TPIR. Et vous? » Le témoin tente des explications mais l’avocate l’arrête et lui signale qu’on lui a refusé le titre d’expert pour lui reconnaître simplement celui de « témoin factuel« .

Maître FOREMAN, pour le CPCR, commence par dire qu’il se sent « frustré » car le témoin avait été présenté comme un témoin des faits alors qu’il n’a finalement que très peu connu SIMBIKANGWA! (NDR. Je pense qu’il en savait beaucoup plus sur l’accusé. Tout le monde, au Rwanda, connaissait la réputation de SIMBIKANGWA. Pas lui?)

Maître FOREMAN de poursuivre. « Votre blog, monsieur MUSABYIMANA, c’est de la recherche ou de la polémique? » Et de faire allusion à un article tendancieux intitulé:  » La France serait-elle prête pour une nouvelle humiliation au Rwanda? » ( NDR: Le témoin commente l’envoi de l’ancienne ministre de la Justice au Rwanda pour représenter la France aux 20èmes commémoration du génocide des Tutsi).

 » Comme ministre française de la Justice, TAUBIRA peut encore inscrire à son actif le récent procès de Pascal SIMBIKANGWA  et faire valoir ce bilan à Kigali. Ce procès est tellement vicié que l’Appel fait par les avocats du condamné a été retenu« . Tels sont les propos du témoin dans cet article publié le 4 avril 2014.

(NDR. Madame TAUBIRA n’ira finalement pas au Rwanda. L’ambassadeur de France à Kigali, nommé pour représenter la France, sera éconduit par les autorités rwandaises. D’autre part, le témoin sait très bien que l’Appel est un droit et qu’il ne présage en rien de l’innocence de l’accusé. Il est ridicule et malhonnête pour  un homme instruit, d’avancer comme argument le fait que le procès ait été « vicié ».)

L’avocat général, monsieur CROSSON DU CORMIER, rebondit sur la question. Il attire tout d’abord l’attention du témoin que nulle part il n’est fait mention de son ancienne appartenance au SCR. Il lui fait remarquer ensuite, à lui qui n’est pas juriste, qu’il appréhende mal la notion de « constat judiciaire » qui est un terme juridique. Il poursuit:  » Vous connaissez « l’autorité de la chose jugée »? Les Rwandais partis en 1959 ont-ils perdu la nationalité rwandaise? Vous, vous vivez en Belgique. Vous êtes Belge. (NDR. Le témoin n’est plus Rwandais car la Belgique n’accepte pas la double nationalité.) En 1990, ce sont bien des Rwandais qui rentrent au Rwanda. Et vous, vous prétendez qu’il s’agit d’une guerre de l’Ouganda contre le Rwanda! » Et d’enfoncer le clou:  » On est dans une Cour d’assises qui juge des faits graves, Monsieur, des crimes commis dans un contexte particulier. Pourquoi parlez-vous de conflit international? »

Maître EPSTEIN vole à nouveau au secours du témoin qu’il a fait citer. « C’est du n’importe quoi!La contestation du constat judiciaire concerne bien le caractère international  de l’agression et non la reconnaissance du génocide! »

Monsieur l’avocat général apprécie peu les propos de la défense:  » J’ai entendu que j’étais ridicule, que c’est n’importe quoi! » Et pointant du doigt l’avocat:  » Je préfère dire n’importe quoi qu’être  n’importe qui! » C’est dit!

Maître EPSTEIN de remercier alors le témoin de « tenir dans cet environnement difficile ». Et d’ajouter:  » Vous avez été témoin de BIZIMUNGU et de ZIGIRANYIRAZO. Tous deux ont été acquittés! » CQFD (NDR. L’avocat irait-il jusqu’à dire que les deux personnes poursuivies doivent leur salut au témoin?)

Et pour conclure, de s’étonner qu’un témoin puisse se faire interroger comme s’il était accusé!

L’audience est suspendue vers 18h45.

Rappel. C’est bien Pierre PÉAN, avec les idées qu’on lui connaît, qui sera entendu lundi matin en lieu et place de messieurs CRUVELLIER et TWAGIRAMUNGU. Pierre PÉAN est l’auteur, entre autre, de l’ouvrage Noires fureurs, blancs menteurs et de nombreux articles mensongers sur le CPCR et ses responsables.

Alain GAUTHIER, président du CPCR.

  1. René DEGNI-SEGUI sera finalement entendu le 10 novembre.
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  2. « Rapport sur la situation des droits de l’homme au Rwanda, soumis par M. R. Degni-Ségui, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme » téléchargeable ici (site de « La France au cœur du génocide des Tutsi » de Jacques Morel).
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  3. Plus de mille Tutsi on été tués sur la colline de Kesho. Si la présence de SIMBIKANGWA a fait l’objet d’un « non lieu« , à Kesho, on se souvient de Simbikangwa (Africa n°1, 31/1/2014 et plusieurs témoins l’avaient cité en première instance : Théoneste HABARUGIRA (24/2/2014) – Michel KAGIRANEZA (20/2/2014). Voir aussi : les rescapés de Kesho se souviennent de Simbikangwa (vidéo AFP – 31/1/2014).
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  4. Inyenzi : « cafard » en kinyarwanda, nom par lequel les Tutsi étaient désignés par la propagande raciste. Cf. glossaire.
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  5. Nombreux sont ceux qui dénoncent les dérives racistes de « La Guerre d’octobre » écrit par Pascal SIMBIKANGWA, en particulier une lettre du 6 août 1962 qu’il reprend page 50 (déjà évoquée par Maître FOREMAN lors de l’audition de Jacques SEMELIN).
    Télécharger le document : 1ère partie (6,4 Mo) – 2ème partie (7 Mo)
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  6. Le génocide des Tutsi n’a pas surgi de manière spontanée au Rwanda. Il est au contraire le produit d’une organisation particulièrement sophistiquée, reposant sur des réseaux d’influence intimement imbriqués. A lire dans la rubrique « Focus » : les réseaux d’influence
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