Procès SIMBIKANGWA : un procès politique ?

Maître EPSTEIN, avocat de Pascal SIMBIKANGWA aux assises de Paris en 2014, et en appel devant les assises de Bobigny du 25 octobre au 3 décembre 2016, ne cesse de dénoncer un procès politique. Son client aurait été condamné à tord, il n’aurait pas été jugé pour ce qu’il a fait au Rwanda en 1994. Il dénonce un procès politique!

Un procès politique ? Mais à qui la faute ? En évoquant à tout moment le rôle du FPR, en dénonçant les soldats du FPR et les crimes qu’ils auraient commis, l’avocat de SIMBIKANGWA a tout fait pour éloigner les jurés de l’objectif qui leur avait été assigné : juger Pascal SIMBIKANGWA. Il ne s’agit pas de sauver les relations diplomatiques entre la France et le Rwanda : « C’est foutu ! » dira-t-il élégamment à la fin de sa plaidoirie.

Lors de cette plaidoirie du vendredi 2 novembre 2016, maître EPSTEIN est revenu sur le fait que SIMBIKANGWA était un « accusé politique ». Cette accusation n’est pas nouvelle. Comme d’autres, il avait déjà présenté la condamnation de l’accusé,  en mars 2014, comme une sorte de cadeau fait au Rwanda à quelques jours de la 20ème commémoration du génocide des Tutsi. Samedi,  à sa sortie du tribunal, il a déclaré au seul journaliste présent qu’il s’agissait d’une « décision torchée, bâclée qui fait honte à la justice française. » Il osera même m’interpeller d’une manière mi-agressive, mi-ironique, en tenant des propos peu dignes pour un avocat : « Vous l’avez maintenant votre génocidaire, monsieur Gauthier. Mais ce n’était pas le bon ! »

Il l’a encore répété hier soir, mercredi 7 novembre, sur les ondes d’Africa N°1 dans l’émission Le Grand Débat. Invité avec Mehdi BA, Bruno BOUDIGUET et moi-même, il a dénoncé « une décision complètement politique qui permet de faire en sorte que les relations entre Paris et Kigali soient bonnes, et de dire à Kigali : « Voilà, enfin, après 20 ans, la première personne condamnée pour génocide par un tribunal français. » Et d’ajouter, comme un leitmotiv : « Ce fut un procès strictement politique ! » Et puis c’est bien connu, « deux témoins qui mentent, c’est deux témoins qui mentent. Et trois témoins qui mentent, c’est la politique de Kigali ! » Et d’ajouter qu’au Rwanda, « on essaie d’éliminer ceux qui veulent dire la vérité, les témoins sont imaginaires, formés par le FPR. »  Tout est dit!

Lors de cette même émission, il a regretté « la présence du FPR dans le procès » en oubliant de préciser que c’est lui qui l’invitait en permanence aux débats, lui et ses témoins de la défense. C’est lui qui a tiré à boulets rouges sur le régime de Kigali, « une dictature, l’URSS de Staline », sur KAGAME, « un cynique » qui a osé poursuivre en justice vingt responsables français pour leur participation au génocide !

C’est le colonel ROBARDEY qui avait déjà déclaré, au procès de première instance aux assises de Paris, que « toutes les accusations sur SIMBIKANGWA (étaient) un montage politique », après avoir dit qu’il ne connaissait pas l’accusé. C’est toujours lui qui, à propos des massacres de Kibilira et ceux des Bagogwe déclarera que sa conviction est faite : « Jean-Marie NDAGIJIMANA a démontré qu’ils étaient l’œuvre du FPR! » C’est lui encore qui parlera des massacres du FPR à Byumba et Ruhengeri. C’est toujours lui qui va dire que les massacres du Bugesera seront perpétrés « à l’instigation du FPR. »

C’est Pierre PEAN, l’invité de la dernière heure, qui va orienter l’audience vers la politisation des débats en répétant que le Rwanda est une dictature : « Le pôle génocide? C’est une très bonne idée, il s’inscrit dans l’universalisme, mais pour bien fonctionner, il faudrait une coopération loyale et franche entre deux justices indépendantes. Celle du Rwanda ne l’est pas car le Rwanda est une dictature.” Et de faire siens les propos de Filip REYNTJENS qui parle de Paul KAGAME comme du « plus grand criminel en fonction, un dictateur sanguinaire ».

Et comme si nous n’avions pas compris, questionné par maître FOREMAN sur le travail du CPCR, il ajoutera : «  Enquêter au Rwanda, on retombe sur le fait que c’est une dictature, avec des témoins qui ne sont pas libres ! » Si ce n’est pas politiser les débats !

Reste à citer un autre témoin de la défense, monsieur Gaspard MUSABYIMANA qui enfoncera le clou en évoquant la décision qui avait été prise par le gouvernement français de l’envoyer à Kigali pour la 20ème commémoration : « Comme ministre française de la Justice, TAUBIRA peut encore inscrire à son actif le récent procès de Pascal SIMBIKANGWA et faire valoir ce bilan à Kigali. Ce procès est tellement vicié que l’Appel fait par les avocats du condamné a été retenu.» Et d’ajouter, concernant ses propres enquêtes : « On me reproche de ne pas être allé au Rwanda pour mes enquêtes?  Qu’aurait-on pu apprendre dans une dictature? La vérité ne peut être faite qu’à l’extérieur du Rwanda, avec les dissidents. »

Le procès de Pascal SIMBIKANGWA, un procès politique ? Maître EPSTEIN a beau jeu de le dénoncer. C’est lui et les siens qui ont voulu faire déraper les débats. Si le FPR a bien été présent au procès, c’est parce que, une fois encore, la défense l’y a invité. Que l’on n’ait pas voulu entendre ceux qui souhaitaient en parler, quoi de plus normal. Ce n’était ni le procès du génocide, ni celui du FPR, ni celui du président KAGAME ! Ce procès a bien été celui de Pascal SIMBIKANGWA. C’est bien le Capitaine de Kiyovu qui a été condamné, par un jury de trois magistrats professionnels et neuf jurés populaires. En leur âme et conscience, au-delà de tout doute raisonnable, loin de toute pression, ils ont confirmé la peine de 25 ans de réclusion criminelle à l’encontre de Pascal SIMBIKANGWA. Condamnation pour « génocide et complicité de crimes contre l’humanité ».

Alain GAUTHIER, président du CPCR.

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Auditions de Laetitia HUSSON (juriste au TPIR), Ignace MUNYEMANZI, le général Jean VARRET, Michaela WRONG et Erasme NTAZINDA (maire du district de NYANZA). Lecture de l'audition de Jacques SEMELIN.